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semblait ravie au 3ième ciel, la vieille Mérance, et elle souriait de ce sourire émouvant et doux comme ces pâles rayons qui touchent parfois un paysage d’hiver déshabitué depuis longtemps des caresses du soleil.

Céline ne pouvait rêver d’autre bonheur que celui de ceux qui l’entouraient. Tout en jouissant des bienfaits de l’heure présente, elle ne pouvait concevoir qu’il en put être jamais autrement. Elle était encore à cet âge où les miracles semblent tout naturels et nullement surprenants. Par malheur, la vie se comporte avec nous d’une manière qui est rarement conforme à notre conception de la logique.

Dans le cours de l’hiver, Cyprien inaugura une série de voyages à Montréal, dans le but de vendre les produits de l’année. Ce fut le commencement du décours de cette lune de miel qui avait duré depuis leur mariage.

Insensiblement, Cyprien qui éprouvait une hâte fébrile de partir, commença à retarder son retour, et Céline ne s’aperçut pas sans effroi qu’il avait bu du whisky plus qu’il n’en avait besoin pour se réchauffer. À cause de ces absences répétées, beaucoup de choses tombèrent en souffrance sur la ferme. Et comme un jour Céline reprochait doucement à son mari sa négligence pour les intérêts de son bien, il lui répondit avec dureté, de conduire ses affaires autour de ses chaudrons, et de ne pas s’inquiéter du reste.

Comme pour donner droit aux réclamations de sa femme, vers la fin de l’hiver, une vache mourut, faute de soins donnés à temps. À la fonte des neiges, et pour la même raison, ce fu-