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Page:Frère Gilles - L'héritage maudit, 1919.djvu/61

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— France ? Il est comme la plupart de nos cultivateurs, c’est-à-dire foncièrement bon.

Le vicaire un peu sceptique sourit en disant :

— Vous êtes enthousiaste M. le curé.

— Quoi ? vous n’êtes pas convaincu ? Rappelez-vous Louis Caron qu’on appelle « refugium peccatorum » précisément parce que sa maison est l’asile assuré de tous les quêteux de Maska et autres lieux. Quand la grange à Nésime Beaulieu a brûlé par le tonnerre, qui l’a relevée et rebâtie en 15 jours ? Ce ne sont pas les hôteliers, vous pouvez en être certain. Et je pourrais vous fournir encore mille exemples de ce genre. D’ailleurs, cette bonté des habitants semble une conséquence naturelle de leur état. L’obligation où ils sont d’attendre tout de la fertilité du sol, du soleil, de la pluie, de Dieu enfin, les met dans la nécessité de reconnaître mieux que d’autres, leur dépendance envers le Créateur. Et c’est pour obtenir ses bienfaits à Lui qu’ils prodiguent les leurs. Ils reçoivent tout gratuitement ; ils donnent gratuitement. ; c’est logique. C’est ainsi que l’amour de la terre engendre la bienfaisance, « l’altruisme » comme disait je ne sais plus quel nigaud dans le journal d’hier, et qui n’est autre, en somme, que le « per charitatem Spiritus servite invicem » de saint Paul.

— C’est vrai ce que vous dites là, M. le curé.

— Cette bienfaisance, cette charité, c’est l’héritage béni entre tous que nos cultivateurs laissent à leurs descendants. L’héritage du père Braise pour un, auquel a dû renoncer momentanément Céline pour suivre son mari, est ja-