Chapitre XXVII
Quand New-Westminster était la capitale de la Colombie-Britannique
Passons maintenant sur la partie continentale de la Colombie-Britannique. Elle fut de bonne heure constituée en colonie distincte, avec pour capitale New-Westminster. Le P. Léon Fouquet, d’Argentré (Mayenne), y avait déjà fondé une mission. Mgr Demers obtenait en même temps la division de son vaste diocèse. Il ne gardait plus pour lui que l’île Vancouver, qui serait réservée désormais au clergé séculier. Toute la portion située sur le continent fut érigée en vicariat apostolique, dont Mgr D’Herbomez allait prendre possession en 1864. Une fois de plus, les Oblats passaient le détroit et remontaient au Nord pour se consacrer à l’immense territoire qui compte aujourd’hui quatre grands diocèses.
L’histoire des travaux apostoliques accomplis dans cette zone du Canada par les disciples de Mazenod venus de France ne saurait entrer dans le cadre de ce récit. Il faut se restreindre à saluer au passage les noms les plus fameux. Sous les trois évêques qui occupèrent pendant près d’un demi-siècle le siège de New-Westminster, cette œuvre d’évangélisation fut sans doute la première en ampleur et en sacrifices dans les provinces de l’Ouest canadien.
Mgr Louis-Joseph D’Herbomez, né à Brion (Nord), de descendance espagnole, avait fait ses débuts dans l’Orégon. Il était vicaire des missions à Esquimalt lorsque le Saint-Siège le nomma premier vicaire apostolique de la Colombie. À New-Westminster, il fonda le Collège Saint-Louis, ou plutôt y transféra celui de Victoria, qui fut longtemps le seul du genre dans toute la région du Pacifique. De cette institution devaient sortir des hommes qui se distinguèrent dans la politique, la magistrature, l’armée. Connaissant à fond toutes les parties de son vicariat presque sans bornes et très montagneux, Mgr D’Herbomez établit les principaux centres de missions qui ont existé depuis.
Son successeur, Mgr Pierre-Paul Durieu, né à Saint-Pal-de-Mons (Haute-Loire), fut l’apôtre des Indiens par excellence. Fortement pénétré de leur mentalité, il conçut la méthode appropriée pour les conduire insensiblement à la voie spirituelle, les faire renoncer à l’existence nomade pour une vie ordonnée et pacifique sous une organisation patriarcale.
Mgr Augustin Dontenwill, originaire de Bischwiller (Bas-Rhin), émigra avec sa famille à Buffalo en 1871 et fit ses études chez les Oblats à Ottawa. Professeur à leur collège de cette ville, il se vit transféré à celui de New-Westminster. Devenu coadjuteur de Mgr Durieu et lui ayant succédé comme évêque, il était nommé en 1908 premier archevêque de Vancouver ; mais il fut élu presque en même temps supérieur général de la congrégation des Oblats, avec résidence à Rome.
À l’extrême nord-ouest de la province se trouve encore la préfecture apostolique de Prince-Rupert. Son premier titulaire, Mgr Émile-Marie Bunoz, né à Sales (Haute-Savoie), se dépensa durant plus d’un demi-siècle dans ce vaste territoire qui comprenait aussi le Yukon. Il y connut la fameuse ruée vers l’or du Klondyke, avec ses suites tragiques pour les mineurs venus de tous les points du monde. Celui qui fut d’abord l’auxiliaire de Mgr Bunoz, un autre Oblat, Mgr Jean-Louis Coudert, originaire de Menât (Puy-de-Dôme), réside maintenant à Whitehorse (Yukon), mais sa préfecture apostolique embrasse encore une partie de la Colombie-Britannique.
Le premier centre agricole : Okanagan-Mission
C’est au milieu de la riante vallée de l’Okanagan, célèbre par l’abondance et la richesse de ses vergers, que surgit le premier centre agricole. Il porte toujours son nom primitif, Okanagan-Mission, sur la rive orientale du lac. Non loin de là, à mi-chemin vers la ville voisine de Kelowna, on peut encore voir un bâtiment vieux d’un siècle — la première école de la vallée — qui vient d’être restaurée à l’occasion du centenaire de la province. Okanagan-Mission eut pour fondateur et génial animateur le P. Charles-Marie Pandosy. Ce Français d’ancienne ascendance grecque, né dans le voisinage de Marseille, se distinguait par un allant très méridional. Toujours un cantique ou une chanson aux lèvres, servi par une voix souple et puissante, il possédait des connaissances étendues en botanique et en médecine. Ses dures années d’apprentissage parmi les aborigènes de l’Orégon, l’avaient rompu à toutes les misères. Il eut pour premier compagnon le P. Pierre Richard, venu de la Haute-Loire.