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guerre interminable. Léon Koun, réformé, devint avocat-avoué — il l’est encore — à Quimperlé (Finistère). Louis Molgat passa tout le temps des hostilités — et au-delà — dans la marine. Libéré seulement en mai 1919, il revint à Sainte-Rose-du-Lac. Dix ans d’absence ne le lui avaient pas fait oublier. Cinq mois après, Louis Molgat épousait Adèle Abraham, petite-nièce d’Edmond Didion, qu’il avait connue fillette sur la ferme voisine de celle qu’il occupait autrefois avec son frère.

Joseph et Louis Molgat ont délaissé la culture pour le commerce. Le premier, sans sortir de la région, a tenu magasin à Makinak, Sainte-Amélie et Laurier, où il vient de mourir. Louis Molgat est retiré à Saint-Vital, d’où il s’évade fréquemment vers Sainte-Rose. Dans ce dernier village, Jean-Louis Guillas coula aussi des jours tranquilles, après une longue carrière d’éleveur et d’agriculteur. Le dimanche, sa maison s’emplissait d’enfants et de petits-enfants.


Sainte-Rose-du-Lac, la « Reine du Nord »

Le départ du P. Lecoq, qui s’était identifié avec le développement de Sainte-Rose, souleva des protestations et il en résulta un certain malaise dans la paroisse. Il eut pour successeur un prêtre séculier, l’abbé Émile-Joseph Labbé, né à Caudebec-lès-Elbeuf (Seine-Inférieure). De santé délicate, il resta peu de temps et fut le dernier des pasteurs venus d’outre-mer.

L’abbé Anatole Théoret, prêtre canadien-français, qui fut curé de Sainte-Rose de 1922 à 1938, a dressé le tableau d’arrivée des colons année par année, avec leur lieu d’origine. Les noms géographiques de France qui reviennent le plus fréquemment sont : Nantes, Quimper, Bagnères-de-Bigorre (Hautes-Alpes), Juigné-les-Moutiers (Loire-Atlantique). Parmi les départements qui se sont montrés les plus généreux, citons : le Finistère, la Loire-Atlantique, le Morbihan, le Pas-de-Calais et la Nièvre ; mais plus d’une trentaine ont apporté leur contribution. Il serait injuste de ne pas signaler qu’à l’époque des débuts, le groupe français a reçu l’apport de plusieurs Belges et Suisses de langue française.

Pointe avancée dans la région des lacs manitobains, Sainte-Rose jouit d’une position avantageuse en ce qui concerne le négoce et des possibilités d’expansion vers de nouveaux territoires. Un curé ambitieux lança autrefois l’idée d’en faire le siège d’un diocèse taillé à même les vastes espaces qui l’entourent. Dans l’attente de ce rêve de réalisation lointaine, son activité commerciale, ses institutions d’enseignement et d’hospitalisation, l’esprit d’initiative de ses habitants justifient pleinement son titre de « Reine du Nord ».