Aller au contenu

Page:Fraigneau - Rouen Bizarre.djvu/31

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
32

dormis. Ils ouvrent des yeux ahuris, se de mandent quel incident se produit, et reprennent leur sommeil deux minutes après.

Nous avons dit qu’on ne s’asseyait presque pas dans la première pièce ; aussi, ceux qui ne peuvent plus se tenir sur leurs jambes se retirent-ils dans un second local, situé en arrière, où sont placés des bancs et des tables. Là, du reste, on est plus libre pour boire sa tasse de café, chanter à tue-tête ou dormir. Sous le plafond noirci par le gaz, et si bas, qu’il paraît comprimer encore le peu d’air respirable, les grosses voix d’hommes résonnent plus formidables, les cris des femmes plus perçans. Les scènes de pugilat sont si fréquentes, les « discussions de ménage » si ordinaires, que personnes ne s’en émeut. On s’assomme, on roule sous les tables, on crie, on menace ; les autres cliens ne disent rien, ils ne s’interposent que lorsqu’on voit briller les lames des couteaux, et encore pas toujours.

Ah ! quelle différence entre les luttes de Marseille jeune à la foire et celles qui ont lieu fréquemment dans ces « assommoirs ! » C’est là qu’on s’arrache véritablement les cheveux et qu’on se crève quelquefois un œil. La jalousie (qui le croirait, dans un tel milieu ?) est cause, la plupart du temps, de ces scènes