Aller au contenu

Page:Fraigneau - Rouen Bizarre.djvu/84

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

presque tous des ouvriers, des marchands des rues, des crieurs des quatre-saisons ou des vendeurs de poissons. On les reconnaît sous leurs habits des dimanches, gênés dans leur marche par les souliers neufs, guindés dans des vêtemens qu’ils ne sont pas habitués à porter tous les jours, avec des manches trop courtes ou trop longues, d’où pendent les grosses mains laborieuses de l’ouvrier, ces mains qui ont travaillé sans faiblir toute la semaine pour faire vivre la femme et les « mioches », et qui paraissent toutes embarrassées de ne rien faire ce jour-là. Quand nous disons rien faire, c’est une exagération, car elles portent dans un panier ou dans une serviette le dîner de la famille, qu’on va aller manger tout à l’heure à « Mon Oncle de Paris » ou ailleurs, en l’arrosant de quelques bons verres de cidre qui fera trémousser tout le monde lorsque le musicien arrivera avec sa vieille guitare.

Le défilé continue, continue sans cesse. Les bambins courent devant, jamais fatigués, se roulant dans les buissons comme une volée de pierrots puis passent des petites ouvrières joyeuses au bras de calicots en goguette et, de temps en temps, quelque vieux couple bien philosophe, portant son modeste repas enveloppé dans un journal, et souriant de