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À des maîtres du monde il les fesait goûter,
Et des Républicains peuvent s’en contenter.
Le sage peut, lui-même, aimer la bonne chère :
Eh ! bien ! le rouge-gorge et le coq de Bruyere,
La truite, qu’en ses lacs éleva Gérardmer,
Le saumon qui vers nous remonte de la mer,
Le bon vin du Faxal, et la liqueur brulée,[1]
D’une cerise agreste avec soin distilée,
Servis dans nos repas par des objets charmans,
Pourraient flatter encor des connaisseurs gourmands,
Des chaumes je pourrais leur vanter les fromages.[2]

Toutefois, mon peinceau cherche d’autres images.
L’humanité s’ouffrante a des droits sur mon cœur.
Ici, de tous les maux, Esculape est vainqueur.
Il vous montre du doigt la source salutaire[3]
Que visita Montaigne et que chanta Voltaire.

Sur un lit de cailloux, qu’autrefois les Romains
Ont, dans un val étroit, cimenté de leurs mains,
Entre deux monts cornus, au fond d’un précipice,
D’un fauxbourg de Paris vous trouvez une esquisse :
C’est Plombières. C’est là que vingt sources au moins
Préviennent, en été, vos vœux et vos besoins.
C’est là qu’un air salubre et des vapeurs bouillantes
Raniment, par dégrés, vos forces chancelantes,
Rendent le mouvement à vos membres perclus,
Et même l’appétit à ceux qui n’en ont plus.

Vous trouvez, au salon, société choisie.

  1. Nom d’une ferme (autrefois Prieuré), entre Mirecourt et Charmes, où les prémontrés recueillaient de l’excellent vin. On peut lire, à ce sujet, des détails piquans, dans la description de la Lorraine et du Barrois, par le respectable C.  Durival.
  2. On nomme ainsi dans les Vôges, de hautes montagnes, dont les sommets offrent de vastes pâturages.
  3. On peut voir les voyages de Montaigne, et l’épître de Voltaire au président Hénault, datée de Plombières.