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Qui, par leurs habitans, seront mieux crayonnés
Du bassin de Nanci la riante peinture,
De son plan régulier l’heureuse architecture,
Ses cercles si polis, ses dehors si charmans,
Veulent un autre style et d’autres ornemens,
Puissent de ces beaux lieux les Citoyens tranquiles
Oublier les malheurs des discordes civiles,
Et rallumer en paix, dans leurs brillans remparts,
Les flambeaux, dont leur goût éclaira les beaux arts !

Au levant, d’où l’on voit la forêt d’Hercinie,
Veut-on de Rome encore admirer le génie ?
Qu’on aille à Saint Odile, à Schirmeck, à Framont,
Du fond du précipice à la cime du mont,
Qu’on cherche les débris d’un boulevard immense.[1]
Au dessus de Colmar, un mur épais commence ;
Ce grand retranchement ne s’interrompt jamais,
Plonge dans les vallons, couronne les sommets ;
Au delà de Saverne on trouve ses vestiges.
Jadis ce Peuple Roi, qui fit tant de prodiges,
Fermait ainsi la Gaule aux barbares Germains :
À de pareils efforts on connaît les Romains.

Des Français d’aujourd’hui l’audace encor plus fière
Dédaigne de construire une telle barrière :
Dans l’enceinte d’un mur ils ne s’enferment pas ;
L’Adda, le Pô, le Rhin, n’arrêtent point leurs pas.
Ils ont su traverser les Alpes consternées,
Franchir les Apennins, gravir les Pyrénées.

  1. On peut voir la description de cette grande muraille dans Schœfflin, qui l’a retrouvée. Bexon en donne une idée dans son histoire de Lorraine.