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Page:France d’Hézecques - Souvenirs d’un page de la cour de Louis XVI.djvu/140

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LES PAGES.

pages avaient aussi leurs gouverneurs et, comme nous, des maîtres de mathématiques, d’allemand, de dessin, de danse, d’armes, de voltige, d’exercice, de connaissance du cheval, sans parler des leçons du précepteur. On voit que si l’éducation n’y était pas bonne, ce n’était pas faute de moyens.

Cette réunion de pages, au manége, à la comédie, provoquait souvent des querelles et des duels d’autant plus dangereux qu’on se servait de fleurets aiguisés qui, par leur forme carrée, aggravaient la blessure. Toutefois, pendant près de six ans que j’ai habité Versailles, aucun page n’y est mort, ni de maladie, ni autrement. Un chirurgien, logé rue du Chenil, avait l’entreprise de recevoir chez lui les pages de la grande écurie malades. Comme on y était très-bien, on allait à cette infirmerie sur le plus léger prétexte. Le roi payait, chaque jour, cinq francs pour chaque page ; et les remèdes prescrits par nos médecins venaient de l’apothicairie de la cour.

Une chose singulière, c’est que l’on choisissait souvent le jardin ou une des chambres de cette maison pour vider ses différends. On y était au moins à portée des secours.

Dans l’hiver de 1790, une difficulté s’éleva entre les pages du roi et ceux des princes. Il fut décidé qu’on laisserait s’écouler le temps du carnaval, pour ne point interrompre les plaisirs de cette époque, et que, sous le prétexte d’une partie de barres, on se réunirait le mercredi des Cendres à la porte Saint-Antoine, sur la