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LE ROI.

mieux exposer sa tête que de compromettre la sûreté d’un seul homme : singulière conduite que la politique condamne, mais que la philanthropie devrait admirer !

Simple particulier, Louis XVI eût été le modèle des hommes ; et personne ne doit lui en vouloir d’une faiblesse que chacun s’empressait d’entretenir en lui par les conseils les plus pusillanimes. Tous tant que nous sommes, Français de toutes les classes, nous avons plus que lui contribué à nos malheurs ; nous en avons été les premiers artisans. Un jour viendra, – il faut pour cela qu’une génération se passe, – où les vertus de ce prince seront appréciées ; où la justice la plus complète lui sera rendue ; et l’admiration de nos neveux, leurs autels expiatoires, offriront une tardive mais éclatante réparation de l’injustice et de l’horreur des persécutions qu’on lui fit éprouver.

Louis XVI avait trente-deux ans lorsque je lui fus présenté. Après une jeunesse faible, son tempérament s’était fortifié au point d’en faire un des hommes les plus robustes du royaume. L’exercice multiplié qu’exigeait sa santé, contribuait à sa force ; tout en lui montrait cette vigueur, suite d’une vie chaste et réglée. Son embonpoint, que chacun s’étudiait à présenter comme une suite de sa mollesse et de ses débauches, loin de lui nuire, donnait plutôt à sa personne une dignité qu’il n’avait jamais eue étant dauphin. Assis sur son trône, Louis XVI ne manqua point de représentation. Il avait, il est vrai, contre lui, quand il marchait, un balancement désagréable que toute sa famille par-