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SOUVENIRS D’UN PAGE.

fiquement vêtu, étincelant de pierreries, dominait, du haut de son trône, cette fameuse réunion ; et, comme si toute la pompe de la terre n’eût pas suffi pour inspirer le respect et le recueillement, le ciel parut vouloir y contribuer. Au moment où le roi prononça son discours, un rayon lumineux perça le taffetas qui masquait l’ouverture de la voûte, et vint luire sur le front majestueux du monarque. Cette circonstance inspira un sentiment de vénération profonde à tous les cœurs généreux et aurait dû arrêter ceux qui déjà méditaient leurs sinistres complots. Le discours du roi achevé au bruit des plus vives acclamations, que cette fois on n’osa lui refuser, le garde des sceaux Barentin, revêtu de la simarre de pourpre, monta lentement les marches du trône pour prendre les ordres du souverain. Le prince s’étant assis, toute l’assemblée suivit son exemple, et la noblesse, d’après son privilége, se couvrit, et la réunion de tous ces plumets offrit un coup d’œil unique. Le garde des sceaux ayant exposé les intentions du roi, M. Necker, toujours mu par le génie de l’orgueil, tira de sa poche un énorme cahier et, dans ce jour consacré à la pompe et aux cérémonies, il ne rougit pas d’occuper l’assemblée pendant une heure et demie de lui-même, de sa conduite et de ses plans ; comme la nature lui avait refusé un organe pur et sonore, il remit son mémoire à un médecin nommé Broussonnet, qui, pendant une heure, fatigua l’assemblée d’une lecture faite plutôt pour un lit de justice que pour un jour aussi solennel.