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Page:France d’Hézecques - Souvenirs d’un page de la cour de Louis XVI.djvu/322

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5 OCTOBRE.

geaient, comme on sait, les ennemis de la royauté. C’était le comte de Lusignan, qui prétendait à l’honneur de descendre des rois de Jérusalem et qui, en effet, était comblé à la cour des distinctions dues à une telle origine, tandis que les véritables rejetons de cette race antique vivaient obscurément au fond de nos provinces méridionales et végétaient dans les rangs subalternes de l’armée.

La discipline sévère que le comte de Valfons, lieutenant-colonel de ce régiment, y avait maintenue à son arrivée à Versailles, fut bientôt détruite par un ordre supérieur. Les vivres furent prodigués par la municipalité. Des inconnus distribuaient l’argent dans les casernes, inondées des prostituées de Paris. Ces soldats qui, à leur arrivée, avaient accueilli par des cris de : Vive le roi ! la proposition qui leur avait été faite par un municipal de prendre la cocarde nationale, se trouvèrent bientôt vendus au parti de l’anarchie. Il était rare que les corps de l’armée se rencontrassent sans se donner de ces repas où les égards entretenaient entre les guerriers ces liaisons de fraternité qui faisaient comme une famille de l’armée tout entière. Les gardes du corps voulurent, selon l’usage, recevoir à un banquet la garnison de Versailles ; on en prit occasion de les rendre odieux au peuple, en lui persuadant que, dans une orgie, ils avaient, en présence du roi, foulé aux pieds la cocarde tricolore et prononcé les serments les plus anticiviques.

Le roi permit que ce repas eût lieu dans la grande