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FÉDÉRATION DE 1790.

On avait préparé, au château de la Muette, dans le bois de Boulogne, un grand festin pour les fédérés ; mais la plupart, après avoir reçu la pluie pendant quinze ou seize heures, préférèrent le repos. Le roi, je ne sais pourquoi, n’y parut point. Ce fut encore M. de La Fayette qui y alla mendier des louanges. La ville de Paris avait eu le soin de faire disposer, à l’École militaire, un très-beau déjeuner pour le roi et des rafraîchissements pour sa maison. Après en avoir profité, je me trouvais à la tribune quand un député de ma connaissance, le marquis de Foucaut de l’Ardimalie, me pria de lui procurer un pain ; ils étaient tous à jeun depuis la veille, étant sortis de chez eux à trois heures du matin, et ne pouvaient quitter leur place. Je cours au buffet, je prends une volaille par les pattes, un pain sous le bras, une bouteille de vin dans chaque poche, et je porte à déjeuner à mon ami et à ses voisins, tous royalistes comme lui. À peine me voit-on que chacun demande du pain ; j’appelle mes camarades ; nous faisons vingt voyages au buffet, et nous sustentons les amis de la royauté, tandis que le côté gauche implorait vainement notre commisération, et n’obtenait tout au plus que des petits pains que nous leur jetions à la tête et qu’ils se disputaient entre eux. Je ne rapporte ceci que pour prouver combien l’esprit de parti était prononcé dans ces temps malheureux.

Tous les fédérés furent fêtés pendant huit jours. Ce n’étaient que bals publics. Les spectacles leur étaient ouverts. Le 18, l’illumination fut générale et très-belle