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SOUVENIRS D’UN PAGE.

espérances, au sort de l’héritier de son nom. Les vœux du roi sont exaucés, Madame est dans ses bras ; c’est là qu’elle réclame ses droits à l’amour des Français ; c’est là qu’elle forme des vœux ardents pour leur bonheur : car, de ses longs et terribles malheurs, il ne lui reste que l’extrême besoin de voir des heureux.

Dès que le roi eut levé tous les obstacles, il instruisit la reine qu’il allait unir bientôt ses enfants adoptifs, et lui demanda de venir l’aider à les rendre plus heureux. La reine accourut ; elle est à Mittaw, depuis le 4 de ce mois. Elle voit tous les regards satisfaits de sa présence, et les vœux qu’elle entend former pour son bonheur lui prouvent combien les Français qui l’entourent ont de dévouement et d’amour pour leurs maîtres. Le lendemain du retour de la reine, le roi se mit en voiture pour aller au-devant de Madame. Une route longue et pénible n’avait point altéré ses forces, elle ne souffrait que du retard qui la tenait encore séparée du roi. Aussitôt que les voitures furent un peu rapprochées, Madame commanda d’arrêter. Elle descendit rapidement ; on voulut essayer de la soutenir ; mais, s’échappant avec une merveilleuse légèreté, elle courut, à travers les tourbillons de poussière, vers le roi qui, les bras étendus, accourait pour la serrer contre son cœur. Les forces du roi ne purent suffire pour l’empêcher de se jeter à ses pieds ; il se précipita pour la relever ; on l’entendit s’écrier : « Je vous revois enfin, je suis heureuse, voilà votre enfant, veillez sur moi, soyez mon père ! » Ah ! Français, que n’étiez-