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SOUVENIRS D’UN PAGE.

courage le rendirent suspect à tous les partis. Les républicains et les anarchistes ne trouvaient pas en lui de garantie. Les royalistes ne lui pardonneront pas d’avoir voté et fait voter son bureau, à la seconde assemblée des Notables, pour la double représentation du tiers état. Ils se réunirent avec les modérés pour blâmer sa conduite envers M. de Favras.

C’est avec aussi peu de partisans que ce prince a espéré remonter sur le trône de France, qu’il a laissé ourdir, à la légère, cent conspirations, toutes sans moyens, conduites par des gens ou ineptes ou fripons, et qui ont plongé une multitude de familles dans le deuil et les alarmes. Mais les favoris ne s’exposaient pas. La faiblesse du prince souscrivait à tout ; le moindre faiseur de projets était accueilli à Blankenburg ou à Mittaw et écouté avec empressement.

J’entrerai dans quelques détails sur le triste sort de M. de Favras et sur la conduite de Monsieur dans cette affaire ; j’en ai été le témoin.

M. de Favras, homme bien né et d’un esprit cultivé, mais d’une tête ardente qui lui fit concevoir mille projets sans le fixer à aucun et l’éloigna, par son inconstance, de la fortune à laquelle ses talents pouvaient le faire parvenir, fut arrêté la veille de Noël 1789. Le banquier Jauge, chef de bataillon de la garde nationale, nous en apporta la nouvelle à la messe de minuit. M. de Favras était accusé de conspiration contre la nation, et surtout d’avoir voulu faire évader le roi, le 5 octobre. Il est possible que la vivacité d’es-