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MONSIEUR.

prit de M. de Favras, son exaltation naturelle, surexcitée par les circonstances, lui aient fait concevoir quelques projets ; mais on n’en eût pas fait un si grand crime s’il n’y avait pas eu d’autres raisons. M. de Lafayette voulait donner au peuple le spectacle de la condamnation d’un noble. M. de Besenval était dans ses mains ; mais ce vieux Suisse avait été l’ami de M. le duc d’Orléans, dont les partisans remplissaient le comité des recherches. En condamnant M. de Favras, on inculpait Monsieur, qui avait eu des rapports avec lui, qui l’avait placé autrefois dans ses gardes suisses. Monsieur pouvait se justifier par une bassesse ou laisser planer le soupçon sur sa tête, mais l’un et l’autre le dégradaient. Le dernier le rendait suspect au peuple, l’autre l’avilissait aux yeux de la France entière. Le faible prince préféra sa sûreté à l’estime publique ; il abandonna M. de Favras, comme Gaston abandonna le duc de Montmorency. Pas un de ses favoris n’usa de son ascendant pour l’empêcher d’oublier son rang en allant à l’Hôtel de ville de Paris et d’y dégrader le nom de Bourbon en prononçant la plus plate apologie de ses faits et gestes, en se déclarant citoyen de Paris, en rappelant sa honte de l’assemblée des Notables, ou « il n’avait cessé de croire qu’une révolution était prête… que l’autorité royale devait être le rempart de la liberté nationale, et la liberté nationale la base de l’autorité royale. » M. Bailly, président de la commune, qui ne manqua pas l’occasion d’avilir la majesté du trône, lui répon-