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Page:Francisque-Michel - Histoire des races maudites, tome I.djvu/92

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core deux ou trois familles de la race des Cagots ; à s’en rapporter à une tradition qui subsiste encore de nos jours, ces parias s’y seraient trouvés autrefois en nombre, et leurs querelles, leurs dissensions avec le peuple, les anecdotes où ils figurent, sont le sujet de récits qui, faits par des vieillards, ne manquent jamais d’intéresser ceux qui ne comptent pas plus d’un demi-siècle de vie. Aujourd’hui les Cagots de Saint-Pé n’ont pas de préférence bien marquée pour une profession plutôt que pour une autre : ils sont ou cordonniers, ou tisserands, ou marchands, tandis qu’autrefois ils n’étaient et ne pouvaient être que charpentiers : de là ce vieux dicton patois encore en usage dans le pays : A la maïson deū Cagot la gouttère, qui correspond au proverbe français : Les cordonniers sont toujours les plus mal chaussés.

Les Cagots de Saint-Pé assistaient aux offices divins dans une espèce de vestibule qui donne entrée dans l’église, mais qui en est distinct. Ils passaient par la porte extérieure qui ouvre sur le cimetière, et qui leur était commune avec les autres fidèles, et prenaient de l’eau bénite dans un bénitier qui se trouvait à droite derrière cette porte. Il leur était interdit de franchir le seuil de la porte intérieure et de s’introduire dans l’église. À une époque évidemment très-reculée ces parias avaient, suivant une tradition qui se conserve encore, une église à eux qu’on appelait Gleïsiate, et dont l’emplacement situé tout-à-fait à l’extrémité occidentale de cette ville est aujourd’hui un champ cultivé. Ce ne fut probablement qu’après la destruction ou la chûte de ce bâtiment qu’ils furent admis au vestibule de l’église paroissiale. Ils avaient encore à eux un autre emplacement, connu depuis sous le nom de Paianquet, situé vers le centre de la ville, où ils enterraient leurs morts à part. Cet emplacement, devenu longtemps après le cimetière des protestants, et ensuite, après la disparition de ceux-ci,