Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/236

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que dans ce domaine. Mais les idées latentes du rêve que nous a révélées l’interprétation des rêves ne font pas partie de ce domaine : nous pourrions aussi bien avoir les mêmes idées dans la vie éveillée. Et pourtant, elles sont inconscientes. Comment résoudre cette contradiction ? Nous commençons à soupçonner qu’il y a là une séparation à faire : quelque chose qui provient de notre vie consciente — appelons-le « les traces des événements du jour » — et partage ses caractères, s’associe à quelque chose qui provient du domaine de l’inconscient, et c’est de cette association que résulte le rêve. Le travail d’élaboration s’effectue entre ces deux groupes d’éléments. L’influence exercée par l’inconscient sur les traces des événements du jour fournit la condition de la régression. Telle est, concernant la nature du rêve, l’idée la plus adéquate que nous puissions nous former, en attendant que nous ayons exploré d’autres domaines psychiques. Mais il sera bientôt temps d’appliquer au caractère inconscient des idées latentes du rêve une autre qualification qui permette de la différencier des éléments inconscients provenant du domaine de l’infantilisme.

Nous pouvons naturellement poser encore la question suivante : qu’est-ce qui impose à l’activité psychique cette régression pendant le sommeil ? Pourquoi ne supprime-t-elle pas les excitations perturbatrices du sommeil, sans l’aide de cette régression ? Et si, pour exercer la censure, elle est obligée de travestir les manifestations du rêve en leur donnant une expression ancienne, aujourd’hui incompréhensible, à quoi lui sert-il de faire revivre les tendances psychiques, les désirs et les traits de caractère depuis longtemps dépassés, autrement dit d’ajouter la régression matérielle à la régression formelle ? La seule réponse susceptible de nous satisfaire serait que c’est là le seul moyen de former un rêve, qu’au point de vue dynamique il est impossible de concevoir autrement la suppression de l’excitation qui trouble le sommeil. Mais, dans l’état actuel de nos connaissances, nous n’avons pas encore le droit de donner cette réponse.