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Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/415

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plaindre de sa maladie, alors qu’elle ne pouvait pas se plaindre de son mariage. Trouvant dans le médecin un auxiliaire, elle oblige son mari qui, dans les circonstances normales, n’avait pour elle aucun égard, à la ménager, à faire pour elle des dépenses, à lui permettre de s’absenter de la maison et d’échapper ainsi pour quelques heures à l’oppression que le mari fait peser sur elle. Dans les cas où l’avantage extérieur ou accidentel que la maladie procure ainsi au moi est considérable et ne peut être remplacé par aucun autre avantage plus réel, le traitement de la névrose risque fort de rester inefficace.

Vous allez m’objecter que ce que je vous raconte là des avantages procurés par la maladie est plutôt un argument en faveur de la conception que j’avais repoussée et d’après laquelle ce serait le moi qui veut et qui crée la névrose. Tranquillisez-vous cependant : les faits que je viens de vous relater signifient peut-être tout simplement que le moi se complaît dans la névrose, que, ne pouvant pas l’empêcher, il en fait le meilleur usage possible, si toutefois elle se prête à ses usages. Dans la mesure où la névrose présente des avantages, le moi s’en accommode fort bien, mais elle ne présente pas toujours des avantages. On constate généralement qu’en se laissant glisser dans la névrose, le moi a fait une mauvaise affaire. Il a payé trop cher l’atténuation du conflit, et les sensations de souffrance, inhérentes aux symptômes, si elles sont peut-être équivalentes aux tourments du conflit qu’elles remplacent, n’en déterminent pas moins, selon toute probabilité, une aggravation de l’état pénible. Le moi voudrait bien se débarrasser de ce que les symptômes ont de pénible, sans renoncer aux avantages qu’il retire de la maladie, mais il est impuissant à obtenir ce résultat. On constate à cette occasion, et c’est là un point à retenir, que le moi est loin d’être aussi actif qu’il le croyait.

Lorsque vous aurez, en tant que médecins, à soigner des névrosés, vous ne tarderez pas à constater que ce ne sont pas ceux qui se plaignent et se lamentent le plus à propos de leur maladie qui se laissent le plus volontiers secourir et opposent au traitement le moins de résistance. Bien au contraire. Mais vous comprendrez sans peine que tout ce qui contribue à augmenter les avantages que