Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/467

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reviendrait à dire qu’on peut guérir en vivant jusqu’au bout sa vie sexuelle. Et si le traitement analytique impliquait un encouragement de ce genre, il mériterait certainement le reproche d’aller à l’encontre de la morale générale, car il retirerait alors à la collectivité ce qu’il accorderait à l’individu.

Mais que vous voilà mal renseignés ! Le conseil de vivre jusqu’au bout sa vie sexuelle n’a rien à voir avec la thérapeutique psychanalytique, ne serait-ce que pour la raison qu’il existe chez le malade, ainsi que je vous l’ai annoncé moi-même, un conflit opiniâtre entre la tendance libidineuse et le refoulement sexuel, entre son côté sensuel et son côté ascétique. Ce n’est pas résoudre ce conflit que d’aider l’un des adversaires à vaincre l’autre. Nous voyous que chez le nerveux c’est l’ascèse qui l’emporte, avec cette conséquence que la tendance sexuelle se dédommage à l’aide de symptômes. Si, au contraire, nous procurions la victoire au côté sensuel de l’individu, c’est son côté ascétique qui, ainsi refoulé, chercherait à se dédommager à l’aide de symptômes. Aucune des deux solutions n’est capable de mettre un terme au conflit intérieur ; il y aura toujours un côté qui ne sera pas satisfait. Rares sont les cas où le conflit soit tellement faible que l’intervention du médecin suffise à apporter une décision, et à vrai dire ces cas ne réclament pas un traitement analytique. Les personnes sur lesquelles un médecin pourrait exercer une influence de ce genre, obtiendraient facilement le même résultat sans l’intervention du médecin. Vous savez fort bien que lorsqu’un jeune homme abstinent se décide à avoir des rapports sexuels illégitimes et lorsqu’une femme insatisfaite cherche à se dédommager auprès d’un autre homme, ils n’ont généralement pas attendu, pour le faire, l’autorisation du médecin ou même du psychanalyste.

On ne prête pas attention dans cette affaire à un point essentiel, à savoir que le conflit pathogène des névrosés n’est pas comparable à une lutte normale que des tendances psychiques se livrent sur le même terrain psychologique. Chez les névrosés, il y a lutte entre des forces dont quelques-unes ont atteint la phase du préconscient et du conscient, tandis que d’autres n’ont pas dépassé la limite de l’inconscient. C’est pourquoi le