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ADDITION
AU LIVRE DEUXIÈME DES CHRONIQUES DE SIRE JEAN FROISSART.



Avant de coordonner et de réunir le vaste ensemble de faits qui compose ses Chroniques, Froissart en avait traité quelques parties avec plus d’affection : ce sont surtout celles qui concernent la Flandre, son pays ; là, il n’avait pas été un simple narrateur de faits contemporains. Sans être mêlé à la vie active de ces temps orageux, il y avait du moins pris une part réelle par ses intérêts ou ses opinions. Lié avec les hommes des divers partis, témoin des événemens, mieux instruit des causes qui les amenaient et les dirigeaient, il devait apparaître dans ces narrations plutôt avec le caractère d’un auteur de Mémoires qu’avec celui d’historien calme et désintéressé. Tel est entre autres le grand soulèvement des villes de Flandre contre les intérêts féodaux, dans l’année 1378, soulèvement qui se termina par la défaite définitive de la démocratie flamande, et peut-être européenne, à la bataille de Rosebecque. Froissart avait regardé cette lutte comme assez importante pour en écrire une histoire séparée. Plus tard, lorsqu’il voulut compléter son grand travail d’ensemble, il y fit entrer ce morceau comme épisode ; et en le refondant un peu pour conserver l’unité de rédaction de ses Chroniques, il en composa la plus grande partie de son deuxième livre, tel qu’on le trouve au commencement de ce volume.

Quelques manuscrits de sa première rédaction, un peu plus détaillée que celle qu’il a refondue, existent encore dans les bibliothèques publiques. Il est fort probable que ces copies auront été faites sur quelque manuscrit plus ancien que ceux des Chroniques générales. J’en connais trois exemplaires sur lesquels je vais donner quelques renseignemens détaillés.

Deux existent à la bibliothèque de Cambray sous les nos 677 et 700, et le troisième à la bibliothèque de la rue Richelieu, sous le no 9,657, fond Béthune. Tous trois sont des copies du même ouvrage, qui, pour avoir été faites dans des temps fort postérieurs, n’en conservent pas moins tous les caractères de l’authenticité.

Je parlerai dans mon troisième volume d’un autre manuscrit non moins curieux, contenant un fragment de Froissart sur le premier d’Artevelle et la première partie de ses Chroniques ; manuscrit que je suis allé examiner avec soin à Valenciennes, et qu’à la demande de M. Guizot, cette ville a bien voulu m’envoyer à Paris.

Dans la préface de ma première édition de Froissart, j’avais déjà dit quelques mots sur le manuscrit de Cambray, no 700, d’après une lettre écrite à M. de Foncemagne par l’abbé Mutte, doyen de Cambray, dont l’original est entre mes mains. Depuis, le savant M. Le Glay a donné quelques renseignemens de plus dans son Catalogue de la bibliothèque de Cambray. Avant de publier cette seconde édition, j’ai cru nécessaire d’aller moi-même à Cambray pour faire un examen plus détaillé de ces deux manuscrits, et voici le résultat de mes investigations. Je commence par le manuscrit 700 de la bibliothèque de Cambray, dont j’avais déjà dit quelques mots.

Manuscrit 700 de la bibliothèque de Cambray. — Il commence ainsi en encre rouge. La moitié des mots est effacée ; mais ces lignes étoient plus lisibles du temps de l’abbé Mutte, et je m’aide de son indication pour suppléer à ce que je n’ai pu lire moi-même.

« S’ensieult la Coronicque de la rébellion de cheuls de Gand et aulcunes villes de Flandre, contre leur seigneur et droicturier prince, qui dura sept ans, et commencha en l’an mil trois cens soissante et dis huit, jusques en l’an de grâce mil trois cens quatre vingt et chincq. »

Puis suit la narration en encre noire, commençant ainsi :

« Je Jehan Froissart, prestre, de la nation de la conté de Haynnau et de la ville de Valenchiennes, et en ce temps trésorier et chanoine de Chymay, qui, du temps passé, me suy entremis de traictier et mettre en prose et en ordonnance les nobles et haultes advenues et grands faicts d’armes qui advenus sont, tant des guerres