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Page:Froissart - Les Chroniques de Sire Jean Froissart, revues par Buchon, Tome II, 1835.djvu/373

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APPENDICE.

terre faictes à Saint Louys de la recognoissance des hommaiges de Guascongne, Bordeaux, Bayonne et des Isles qui sont en droict Normandie : et ès dictes lectres est expressément contenu comment les roys d’Angleterre ont renoncé à toutes les terres de Normandie, d’Anjou, du Maine, de Touraine et de Poictou si aucun droict y avoient, comme plus à plain est contenu ès dictes lettres, lesquelles furent montrées au dict empereur. Et aussi monstra le traicté de la paix, et comment son père et luy l’avoient moult cher acheptée, et comment par les Anglois elle fut mal gardée ; et le déclara particulièrement tant par le deffault de rendre les forteresses occupées qu’ils debvoient rendre, comme par les ostaiges qu’ils rençonnèrent contre le contenu au traicté, comme par les compaignéis que continuellement ils teindrent au royaume de France, comme par usurper et user des droicts de souverainelé qui appartiennent au roy, desquels ils ne debvoient point user : comme de conforter le roy de Navarre lors ennemy du royaume, ses adhérans et confortans de leurs gens, subjets et alliez, tant Anglois comme Guascons, et leur donner passaiges, vivres et confort contre la teneur des alliances faictes, jurées et passées par sermens si forts comme ils se peuvent faire entre chrestiens ; lesquelles alliances furent aussi monstrées et leües au dict empereur en françois et en latin afin que chascun les peut mieux entendre : et en outre le prince de Galles feit tant d’outraiges et d’extorsions au pays et gens de Guascongne qui encores estoient demeurez soubz la souveraineté et ressort du roy, ne oncques renonciation n’en fut ne n’ha esté faicte, comme le roy le faict monstrer par la lectre du traicté où est la clause qui se commence c’est à sçavoir. Et monstra aussi le roy comme le comte d’Armaignac, le seigneur d’Albret et plusieurs autres barons et bonnes villes avoient appelé du prince à luy, et vinrent en leurs personnes requérir adjournement et rescript en cause d’appel, et comme le roy y meit longuement et feit grande difficulté ainçois qu’octroyer le voulut : et par le conseil sur ce pris de plusieurs notables avec ceux de son conseil, eües aussi les opinions de plusieurs estudes de droict, de Boulongne la grasse, de Montpelier, de Thoulouze et d’Orléans et des plus notables clercs de la court de Rome qui refuser ne le pouvoient ; et comment par voye ordonnée de justice le roy le feit, et non pas par puissance d’armes ; et fut ordonné un docteur juge du roy à Thoulouze appelé maistre Bernard Palot, et un chevalier nommé messire Jean de Chaponval qui portèrent au dict prince les lectres du roy, les inhibitions et adjoumements, et par le sauf-conduict du séneschal du dict prince veindrent près du dict prince, le quel les feit prendre et meurtrir mauvaisement contre Dieu et justice et en offense du roy et du royaume de France. Et aussi monstra le roi au dict empereur comment, nonobstant les dictes deffenses ainsi faictes, il envoya au dict roy Édouard comtes, chevaliers et clercs pour le sommer et requérir, de par luy, de redresser et faire redresser les choses ainsi par son fils et ses subjets mauvaisement faictes ; et désiroit le roy, que par voye amiable remède s’y meit et non pas par guerre. À quoy response raisonnable ne d’aucune bonne espérance ne fut au roi donnée : et de faict avoit desja encommencé la guerre le dict prince en Guascongne contre les appelans ; et aussi avoient faict en Poictou les gens du dict roy d’Angleterre, et chevauché en la terre du roy. Pourquoy, par nécessité et par le conseil de son royaume pour ce assemblé en son parlement, entreprit à deffendre sa bonne justice contre ses ennemis.

Après ce que le roy eut monstré l’occasion de la guerre et bien informé par les responses et lectres sçellées l’empereur et son conseil, il lui dit et monstra les debvoirs qu’il avoit faits pour avoir bon traicté à ses adversaires : et aussi finablement lui monstra les offres que sur ce il avoit faict ; et conclud ses paroles à deux fins dessus escriptes : de manifester le droit du roy contre les paroles mensongères des Anglois et non y adjouster foy, et aussi de donner le conseil sus escript. Et aussi lui toucha assez brief les grâces et bonnes fortunes que nostre seigneur luy avoit donné en sa guerre, pour ce qu’il pensoit que le dict empereur en seroit bien liez. Et toutes ces choses et plusieurs autres touchant ces matières qui trop longues seroient à escripre, dit le roi si saigement et si ordonnément, que tous feurent esmerveillez de son bon mémoire et belle manière de parler ; de quoy l’empereur et tous ceux qui le sceurent entendre monstrèrent semblant d’en