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Page:Fusil - Souvenirs d’une actrice.djvu/148

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souvenirs d’une actrice.

Cela fut entendu de ses voisins qui ne manquèrent d’en rire et de le répéter.

Il avait beaucoup de créanciers, et il leur jouait des tours de page. Les voyant arriver de sa fenêtre, il faisait chauffer la clef de sa porte, de manière à leur brûler outrageusement la main ; il les entendait dégringoler les escaliers, en grommelant et le menaçant des huissiers, ce qui ne l’inquiétait guère.

Un jour, apercevant un de ses plus tenaces créanciers, il prend son manteau, car il commençait à pleuvoir, et s’empresse de le joindre dans la cour. Bientôt la pluie tomba à verse, et le créancier furieux fut obligé de lâcher prise. Alors M. de Champcenetz se mit à chanter le morceau de Didon :

Ah ! que je fus bien inspirée,
Quand je vous reçus dans ma cour.

Il était bien l’homme le plus gai, le plus amusant que j’aie jamais connu. Hélas ! il porta cette gaîté jusqu’au pied de l’échafaud. Il disait au prince de Salm, dont la charette précédait la sienne : « Donne donc pourboire à ton cocher, ce maraud ne va pas. »