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et de saint Abraham, de quitter le corps de cette personne (la nommer) et de descendre au fond de la mer ou dans les entrailles de la terre. Ainsi soit-il. Amen. »

Voici l’ordonnance à suivre : faire uriner le malade dans un pot où l’on aura mis une poignée d’éclaire[1].

Remède pour guérir l’arête. (On appelle ainsi une tumeur enflammée qui est occasionnée par la piqûre d’une écharde ou une contusion). – C’est le charpentier du lieu qui opère, avec une hache spéciale, connue sous le nom d’épaule de mouton ; le patient place le membre malade sur 2 brins de paille posés en croix en haut d’un tabouret ; le guérisseur, en coupant les brins de paille au niveau du tabouret, lui dit : « Qu’est-ce que je coupe ? » – Le malade répond : « L’arête ». – Le guérisseur reprend : « Arête, je te coupe comme saint Pierre a coupé l’oreille à Malchus ». Il répète trois fois ces paroles ; mais pour que l’opération ait du succès, il faut que les brins de paille coupés sautent en l’air avant de tomber ; sinon l’arête ne serait pas guérie.

Ces pratiques – qui jouissent encore d’un certain crédit – rappellent les plus beaux jours des guérisseurs du secret et des jeteurs de sort.

Il n’y avait guère de maisons au siècle dernier qui n’eussent, dans leur étable, un sort jeté par un mécréant, un habitué du sabbat. Ses bestiaux dépérissaient et mouraient frappés subitement d’un mal mystérieux, si on ne faisait pas aussitôt conjurer le mal et « désensorceler » la maison.

À cet effet, le propriétaire se rendait chez le guérisseur le plus proche, un vieux malin qui exploitait habilement la crédulité populaire et jetait de la poudre aux yeux par

  1. Cette plante est la Chelidonium majus des botanistes. Elle a mérité ce surnom populaire, parce que le suc jaunâtre qu’elle exude était employé pour combattre les maladies d’yeux.