Page:G. Bruno - Le Tour de la France par deux enfants, 1904.djvu/172

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Pendant qu’on devisait ainsi, la voiture avançait bon train : le vent la poussait par derrière et ajoutait sa force à celle du cheval. Mais, à un détour de la route, qui descendait en pente rapide, le vent souffla si fort que la voiture se trouva précipitée en avant avec une violence sans pareille.

Le cheval n’eut pas la force de se maintenir, et il s’abattit brusquement. La secousse fut telle que les voyageurs se trouvèrent lancés tous les quatre hors de la voiture.

Chacun se releva plus ou moins contusionné, mais sans blessure grave. Seul, le petit Julien avait le pied droit et le poignet tellement meurtris et engourdis qu’il ne pouvait appuyer dessus. Quand il voulut se relever et marcher, la douleur l’obligea de s’arrêter aussitôt. En même temps, il se sentait la tête toute lourde et le front brûlant ; il se retenait à grand’peine de pleurer.

André était bien inquiet, craignant que l’enfant n’eût quelque chose de brisé dans la jambe et dans le bras.

Le conducteur, fort inquiet lui-même, s’approcha de Julien ; il lui fit remuer les doigts de la main et ceux du pied blessé, et voyant que le petit garçon pouvait remuer les doigts : — Il n’y a probablement rien de brisé, dit-il ; c’est sans doute une simple entorse au pied et à la main.

Puis, s’adressant à André : — Jeune homme, prenez votre mouchoir et celui de l’enfant ; mouillez-les avec l’eau du fossé : appliquez ces mouchoirs mouillés en compresses, l’un au pied, l’autre au poignet de votre frère. L’eau froide est le meilleur remède au commencement d’une entorse ou de toute espèce de blessure ; elle empêche l’enflure et l’irritation.

Pendant qu’André s’empressait de soigner son petit frère et lui appliquait les compresses d’eau froide, le conducteur releva le cheval, qui n’avait pas de mal ; mais les brancards de la voiture étaient brisés. Il était impossible de remonter dans le char-à-bancs, et il fallut aller chercher de l’aide pour le traîner jusque chez le charron du plus prochain village.

Julien ne pouvait marcher, et il se plaignait de plus en plus d’un violent mal de tête.

André le prit dans ses bras et, le cœur tout triste, il fit ainsi une demi-lieue de chemin en portant le petit garçon qui se désolait.

André, disait le pauvre enfant, qu’allons-nous devenir à