présent que je ne puis plus marcher ? Comment ferons-nous pour aller jusqu’à Marseille ?
— Ne te tourmente pas, mon Julien. N’avons-nous pas cent francs à nous ? Nous profiterons de ces économies que nous avons eu le bonheur de faire, et nous prendrons le chemin de fer d’ici à Marseille. Oh ! Julien, quelle joie d’avoir une petite épargne, quand le malheur arrive !
— Mais cela coûtera bien cher, André. Il ne nous restera plus rien une fois à Marseille. Et si nous ne trouvons pas notre oncle, que deviendrons-nous ? O mon Dieu, que nous sommes donc malheureux !
— Mais non, mon Julien ; le voyage ne coûtera pas aussi cher que tu crois : une trentaine de francs, peut-être même pas. Tu vois bien que nous ne sommes pas trop à plaindre.
— Oh ! j’ai bien du chagrin tout de même ! dit l’enfant en soupirant. Je vais être un embarras.
— Ne parle pas ainsi, Julien, dit André en serrant l’enfant sur son cœur. Si tu as du courage, si tu ne te désoles pas, tout se passera mieux que tu ne penses. N’avons-nous pas traversé déjà bien des épreuves, et la bonté de Dieu nous a-t-elle jamais fait défaut ? Compte encore sur elle, mon Julien, et restons calmes en face d’un malheur qu’il n’a pas dépendu de nous d’éviter.
Du bras qu’il avait de libre l’enfant entoura le cou de son frère, et l’embrassant il répondit entre deux soupirs :
— Je vais tâcher d’être raisonnable, André, et je vais prier Dieu pour qu’il me donne du courage.
En arrivant au bourg voisin de l’accident, les deux enfants furent installés chez une excellente femme du lieu.
Le petit Julien souffrait de plus en plus. Il portait sans cesse la main à son front : la tête, disait-il, lui faisait bien plus de mal que tout le reste.
On le coucha pour le reposer, mais il ne put dormir. La fièvre l’avait pris, une de ces fièvres brûlantes qui sont le principal danger des chutes.
André alarmé courut chercher le médecin. Par malheur,