l’eau d’une rivière ou d’une mare. L’eau de l’Océan, au contraire, avance, avance pendant six heures sur la terre comme une inondation : alors il y a de grands terrains tout couverts d’eau ; puis après, elle redescend pendant six autres heures, et on peut marcher à pied sec là où elle était, comme j’ai fait à la Rochelle. Seulement on n’y peut rien laisser, vous pensez bien, ni rien bâtir ; car elle revient ensuite pendant six autres heures et elle emporterait tout ; et c’est comme cela, toujours, toujours, depuis que le monde est monde. Il paraît que c’est la lune qui attire ainsi et soulève l’eau de l’Océan. Je vous dirai, Jean-Joseph, que c’est tout à fait amusant, quand on est sur le bord de la mer, de jouer à courir au devant des vagues. On a beau se dépêcher, voilà que quelquefois les vagues courent plus vite que vous, et on en reçoit de bonnes giboulées dans les jambes ; et on rit, parce qu’on a eu peur tout de même.
Mais je suis sûr, Jean-Joseph, qu’en lisant ma lettre vous vous dites : — Est-il heureux, ce Julien-là, de voyager ainsi et de voir tant de belles choses, tandis que moi je fais tout bonnement des paniers le soir à la veillée, après avoir gardé les bêtes aux champs tout le jour ! Ah ! Jean-Joseph, ne vous pressez pas tant de parler. Quand vous saurez nos aventures, vous verrez qu’il y a bien des ennuis partout, allez.