Page:G. Bruno - Le Tour de la France par deux enfants, 1904.djvu/61

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ville de Phalsbourg, petit Julien, elle a vu naître le maréchal Lobeau, encore le fils d’un boulanger, qui devint un de nos meilleurs généraux et dont on disait : « il est invariable comme le devoir. »

Mais si les hommes, en Lorraine, se sont illustrés à défendre la patrie, sachez qu’une femme de la Lorraine, une jeune fille du peuple, Jeanne Darc s’est rendue encore plus célèbre. Écoutez son histoire.


I.   Jeanne Darc était née à Domremy, dans le département des Vosges où nous sommes, et elle n’avait jamais quitté son village.

Bien souvent, tandis que ses doigts agiles dévidaient la quenouille de lin, elle avait entendu dans la maison de son père raconter la grande misère qui régnait alors au pays de France. Depuis quatre-vingts ans la guerre et la famine duraient. Les Anglais étaient maîtres de presque toute la France ; ils s’étaient avancés jusqu’à Orléans et avaient mis le siège devant cette ville ; ils pillaient et rançonnaient le pauvre monde. Les ouvriers n’avaient point de travail, les maisons abandonnées s’effondraient, et les campagnes désertes étaient parcourues par les brigands. Le roi Charles VII, trop indifférent aux misères de son peuple, fuyait devant l’ennemi, oubliant dans les plaisirs et les fêtes la honte de l’invasion.

LA MAISON DE JEANNE DARC. — C’est à Domremy, en 1409, que naquit Jeanne Darc. On montre encore aujourd’hui cette maison, qu’un Anglais voulut acheter en 1814 à un prix élevé, mais que le propriétaire ne voulut pas lui vendre. Près de la maison, en l’honneur de Jeanne Darc, on a fondé une école gratuite pour les jeunes filles du pays.

Lorsque la simple fille songeait à ces tristes choses, une grande pitié la prenait. Elle pleurait, priant de tout son cœur Dieu et les saintes du paradis de venir en aide à ce peuple de France que tout semblait avoir abandonné.

Un jour, à l’heure de midi, tandis qu’elle priait dans le jardin de son père, elle crut entendre une voix s’élever : — Jeanne, va trouver le roi de France ; demande-lui une armée, et tu délivreras Orléans.

Jeanne était timide et douce ; elle se mit à fondre en larmes. Mais d’autres voix continuèrent à lui ordonner de partir, lui promettant qu’elle chasserait les Anglais.