Page:Gaboriau - L’Affaire Lerouge.djvu/359

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venu. Albert était terrifié. Une sueur glacée mouillait son front et glissait en gouttelettes le long de ses joues. Ses mains tremblaient si fort qu’il ne pouvait s’en servir. D’une voix étranglée, il répétait :

— C’est horrible ! horrible !

— Enfin, poursuivit l’inexorable juge, voici le pantalon que vous portiez le soir du meurtre. Il est visible qu’il a été mouillé, et à côté de la boue, il porte des traces de terre. Tenez, ici. De plus, il est déchiré au genou. Que vous ne vous souveniez plus des endroits où vous êtes allé vous promener, je l’admets pour un moment, on peut le concevoir, à la rigueur. Mais à qui ferez-vous entendre que vous ne savez pas où vous avez déchiré votre pantalon et éraillé vos gants ?

Quel courage résisterait à de tels assauts ! La fermeté et l’énergie d’Albert étaient à bout. Le vertige le prenait. Il se laissa tomber lourdement sur une chaise en disant :

— C’est à devenir fou !

— Reconnaissez-vous, insista le juge dont le regard devenait d’une insupportable fixité, reconnaissez-vous que la veuve Lerouge n’a pu être frappée que par vous ?

— Je reconnais, protesta Albert, que je suis victime d’un de ces prodiges épouvantables qui font qu’on doute de sa raison. Je suis innocent.