Page:Gaboriau - L’Affaire Lerouge.djvu/368

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au coupable ? En procédant par induction du connu à l’inconnu. J’ai examiné l’œuvre et j’ai jugé l’ouvrier. Le raisonnement et la logique nous conduisent à qui ? À un scélérat déterminé, audacieux et prudent, rusé comme le bagne. Et vous pouvez croire qu’un tel homme a négligé une précaution que n’omettrait pas le plus vulgaire coquin ! C’est invraisemblable. Quoi ! cet homme est assez habile pour ne laisser que des indices si faibles qu’ils échappent à l’œil exercé de Gévrol, et vous voulez qu’il ait comme à plaisir préparé sa perte en disparaissant une nuit entière ! C’est impossible. Je suis sûr de mon système comme d’une soustraction dont on a fait la preuve. L’assassin de La Jonchère a un alibi. Albert n’en invoque pas, donc il est innocent.

M. Daburon examinait le vieil agent avec cette attention ironique qu’on accorde au spectacle d’une monomanie singulière. Quand il s’arrêta :

— Excellent monsieur Tabaret, lui dit-il, vous n’avez qu’un tort. Vous péchez par excès de subtilité. Vous accordez trop libéralement à autrui la prodigieuse finesse dont vous êtes doué. Notre homme a manqué de prudence parce qu’il se croyait au-dessus du soupçon.

— Non, monsieur, non, mille fois non. Mon coupable à moi, le vrai, celui que nous avons manqué, craignait tout. Voyez d’ailleurs si Albert se défend. Non. Il est anéanti parce qu’il reconnaît des concor-