Page:Gaboriau - L’Affaire Lerouge.djvu/392

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La religieuse s’était relevée et était venue, elle aussi, se placer près du lit.

— Monsieur le docteur, dit-elle, tout est prêt.

— Alors, ma sœur, appelez la bonne, pour qu’elle nous aide, nous allons envelopper votre malade de sinapismes.

La domestique accourut. Entre les bras des deux femmes, madame Gerdy était comme une morte à laquelle on fait sa dernière toilette. À la rigidité près, c’était un cadavre. Elle avait dû beaucoup souffrir, la pauvre femme, et depuis longtemps, car elle était d’une maigreur qui faisait pitié à voir. La sœur elle-même en était émue, et pourtant elle était bien habituée au spectacle de la souffrance. Combien de malades avaient rendu le dernier soupir entre ses bras, depuis quinze ans qu’elle allait s’asseyant de chevet en chevet !

Noël, pendant ce temps, s’était retiré dans l’embrasure de la croisée, et il appuyait contre les vitres son front brûlant.

À quoi songeait-il, tandis que se mourait, là, à deux pas de lui, celle qui avait donné tant de preuves de maternelle tendresse, d’ingénieux dévouement ? La regrettait-il ? Ne pensait-il pas plutôt à cette grande et fastueuse existence qui l’attendait là-bas, de l’autre côté de l’eau, au faubourg Saint-Germain ? Il se retourna brusquement en entendant à son oreille la voix de son ami.