Page:Gaboriau - Le Crime d’Orcival, 1867.djvu/157

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Ce qui est un fait, c’est que, pour se délivrer de cette menace perpétuelle qui troublait sa vie, M. de Trémorel a tué sa femme…

Si logique était la déduction, ses derniers termes faisaient si bien éclater l’évidence, que le docteur et le père Plantat ne purent retenir une exclamation approbative.

Ils s’écrièrent ensemble :

— Très-bien !

— Maintenant, reprit M. Lecoq, des divers éléments qui ont servi à former notre conviction, il faut conclure que le contenu de cette lettre est tel que, retrouvée, elle enlèverait nos dernières hésitations, elle doit expliquer le crime et rendre inutiles les précautions de l’assassin.

Le comte devait donc faire tout au monde, tenter l’impossible, pour ne pas laisser derrière lui ce danger.

C’est pourquoi, les préparatifs qui, à son sens, devaient égarer la justice, terminés, malgré le sentiment d’un péril imminent, malgré l’heure qui passe, malgré le jour qui vient, M. de Trémorel, au lieu de fuir, recommence avec plus d’acharnement que jamais ses inutiles perquisitions.

De nouveau il revoit les meubles à l’usage de sa femme, les tiroirs, les livres, les papiers. En vain.

Alors il se décide à explorer le second étage, et toujours armé de sa hache, il monte.

Déjà il a attaqué un meuble, lorsque dans le jardin un cri retentit. Il court à la fenêtre : Que voit-il ?

Philippe et le vieux La Ripaille sont debout au bord de l’eau, sous les saules du parc, près du cadavre.

Comprenez-vous l’épouvantable effroi de l’assassin !

Désormais, plus une seconde à perdre, il n’a que trop attendu déjà. Le danger est pressant, terrible. Il fait jour, le crime est découvert, on va venir, il se voit perdu sans ressources.

Il faut fuir, fuir à l’instant, au risque d’être vu, d’être rencontré, d’être arrêté.