Page:Gaboriau - Le Crime d’Orcival, 1867.djvu/159

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criminel, je ne puis, ni me tromper, ni avoir raison à demi. Ou toutes mes déductions sont justes, ou il n’en est pas une seule qui le soit. C’est tout ou rien. Si je suis dans le vrai, Guespin n’a pas trempé dans le crime, — au moins directement, puisqu’il n’est pas une circonstance qui fasse soupçonner un concours étranger. Si au contraire, je m’abuse…

M. Lecoq s’interrompit. On eût dit qu’il prêtait l’oreille à quelque bruit insolite venu du jardin.

— Mais je ne m’abuse pas, reprit-il, j’ai contre le comte une autre charge encore, dont je ne vous ai pas parlé, et qui me paraît bien concluante.

— Oh ! fit le docteur, à quoi bon désormais ?

— Deux sûretés valent mieux qu’une, monsieur, et moi je doute toujours. Donc, laissé seul un moment, ce tantôt, par monsieur le juge de paix, j’ai demandé à François, le valet de chambre, s’il savait exactement le compte des chaussures de son maître. Il m’a répondu que oui, et m’a conduit dans le cabinet où on serre les chaussures.

Il manquait une paire de bottes à tiges de cuir de Russie vert, mises, le matin même, — François en est sûr, — par le comte de Trémorel.

Ces bottes, je les ai cherchées avec un soin minutieux, je ne les ai pas aperçues.

Enfin, la cravate que portait le comte dans la journée du 8, qui est bleue avec des raies blanches, a disparu également.

— Voilà, s’écria le père Plantat, voilà l’indiscutable preuve de vos suppositions au sujet des pantoufles et du foulard.

— Il me paraît en effet, répondit l’agent de la sûreté, que les faits sont assez rétablis pour nous permettre d’aller de l’avant. Recherchons maintenant les événements qui ont dû déterminer…

Depuis un moment déjà M. Lecoq, tout en parlant, observait sournoisement le dehors.

Tout à coup, sans un mot, avec cette foudroyante har-