Page:Gaboriau - Le Crime d’Orcival, 1867.djvu/164

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Le misérable ne répondit pas.

— Prenez garde, insista le père Plantat, votre silence nous confirmera dans l’idée que vous êtes venu avec les pires desseins.

Mais c’est en vain que le père Plantat épuisa son éloquence persuasive, le rebouteux se renfermait dans une farouche et silencieuse immobilité.

Alors M. Gendron se décida à prendre la parole, espérant, non sans raison, qu’il aurait quelque influence sur son ancien domestique.

— Réponds, interrogea-t-il, que voulais-tu ?

Le rebouteux fit un effort, et ses yeux dénoncèrent une vive souffrance. Parler, avec sa mâchoire démise, était douloureux.

— Je venais pour voler, répondit-il, je l’avoue.

— Voler !… quoi ?

— Je ne sais pas.

— On n’escalade pas un mur, on ne risque pas la prison sans une intention bien arrêtée d’avance.

— Eh bien, donc je voulais…

Il s’arrêta.

— Quoi ? parle.

— Prendre des fleurs rares dans la serre.

— Avec ton coutelas, n’est-ce pas ? fit en ricanant M. Lecoq.

Le rebouteux lui lançant un regard terrible, il continua :

— Ne me regarde pas ainsi, tu ne me fais pas peur. Puis, toi qui es fin, ne nous dis donc pas de niaiseries. Si tu nous crois beaucoup plus bêtes que toi, tu te trompes, je t’en préviens.

— Je voulais prendre les pots, balbutia maître Robelot, pour les revendre.

— Allons donc ! fit l’agent de la sûreté en haussant les épaules, ne répète donc pas tes inepties. Toi, un homme qui achète et paie comptant des terres excellentes, voler des pots de bruyère ! À d’autres. Ce soir, mon garçon, on t’a retourné comme un vieux gant. Bien malgré toi,