Page:Gaboriau - Les Gens de bureau, Dentu, 1877.djvu/174

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— Ah ! dit-il, je vois bien que l’on trompe ici ! Mais consultons quelque autre statisticien.

Ricardo, Adam Smith et M. Schnitzler, dont il invoqua tour à tour l’autorité, ne s’éloignent guère que de quelques mois du chiffre de Déparcieux.

— Allons, pensa Caldas, mes quatre-vingt-dix francs courent grand risque d’être flambés ! Mais non, j’en aurai le cœur net, je veux rattraper mon argent, je resterai ici, je ferai mes trente-six ans, et quand j’aurai ma retraite (je suis décidé à vivre très-longtemps) pour vexer l’administration et lui faire du tort, je vivrai plus vieux que le centenaire du Constitutionnel, et l’on mettra ma longévité dans les faits-divers !

Cette résolution prise, il concentra toute son intelligence à se donner l’air et l’esprit bureaucratiques.

Pour commencer, il apporta un vieux paletot, déférant enfin aux observations de M. Rafflard, qui, à plusieurs reprises, avait paru choqué de lui voir conserver pour travailler au bureau ses habits neufs.

Le vêtement de travail, en effet, est aussi nécessaire à l’employé qu’au canotier la vareuse.

Il n’est pas riche, l’employé, en général, et il lui faut faire des miracles d’industrie pour n’avoir pas des chapeaux trop gras avec des appointements si maigres.