Page:Gaboriau - Les Gens de bureau, Dentu, 1877.djvu/189

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travailleur, n’en croyez rien ; c’est un bruit que les paresseux font courir.

— Je goûte fort vos raisonnements, dit Caldas ; mais vous êtes resté dans les généralités, et sur ce terrain on plaide avec un égal avantage le pour et le contre. Passons, s’il vous plaît, à mon cas particulier, et puisqu’il s’agit de moi, faites de la personnalité.

— Soit, continua M. Bizos. Vous gagnez aujourd’hui douze cents francs, dans trois ans vous en gagnerez quinze cents, dans six ans dix-huit, et ainsi de suite. À quarante ans vous aurez un traitement de quatre mille francs, c’est-à-dire à peu près de quoi manger quand vous n’aurez plus de dents. Et notez bien que je vous dore la pilule, je vous suppose de ces gens heureux ou adroits qui retournent le roi cinq fois par partie. Vous ne serez ni heureux ni adroit : attendez-vous donc à végéter toute votre vie dans un emploi de mille écus.

— J’admets le calcul de M. Bizos, riposta M. Sangdemoy ; seulement il porte à faux. Si tous les appelés ne sont pas élus, c’est de leur faute. Nous sommes trois mille employés à l’Équilibre : quinze cents resteront copistes, parce qu’ils sont inintelligents ou paresseux ; ce sont les traînards et les éclopés ; ils peuvent faire leur mea culpa. Mille ne dépasseront pas les grades intermédiaires, ce sont les négligents et les in-