Page:Gaboriau - Les Gens de bureau, Dentu, 1877.djvu/83

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jeu et gagna à un point de différence, en n’en comptant pas trois que son adversaire lui vola.

Gérondeau était furieux d’avoir perdu. Il reconnaissait bien là, disait-il, sa déveine ordinaire. Comme il est plein d’amour-propre, il ne voulait pas s’avouer la supériorité de Caldas, et, convaincu qu’il devait gagner :

— Me donnez-vous ma revanche ? demanda-t-il.

— Certainement, dit Romain.

C’était à Gérondeau de commencer. Il fit onze points de suite ; la partie était en vingt.

Au onzième carambolage qui ouvrait une série, il fit une seconde motion :

— Tenez, dit-il, je suis bon prince, je joue, contre votre dîner, les quatre bouteilles de vin de Champagne que j’ai perdues et toute la consommation. Garçon, une bouteille de madère et des londrès !…

— Oh ! oh ! pensa Caldas, c’est par trop violent. Nous allons bien voir.

Et comme la joie avait fait manquer à Gérondeau son carambolage sûr, Caldas prit la queue et ne la quitta que la partie gagnée.

L’expéditionnaire aux douze mille livres de rente fut anéanti sur le moment. Mais, après réflexion, il dit tout bas à l’élégant Nourrisson :