Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 1.djvu/154

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toutes les larmes de son corps » aux moments pathétiques.

Pour seconder ces artifices de toilette, elle avait tiré de son répertoire de grimaces, un petit air innocent, malheureux et résigné, tout à fait propre, selon elle, à se concilier les bonnes grâces et l’indulgence du magistrat dont son sort allait dépendre.

Ainsi travestie, les yeux baissés, la voix mielleuse, le geste patelin, elle ressemblait si peu à la terrible patronne de la Poivrière que ses pratiques eussent hésité à la reconnaître.

En revanche, rien que sur la mine, un vieux et honnête célibataire lui eût proposé vingt francs par mois pour se charger de son ménage.

Mais M. Segmuller avait démasqué bien d’autres hypocrisies, et l’idée qui lui vint fut celle qui brilla dans les yeux de Lecoq.

— Quelle vieille comédienne !…

Sa perspicacité, il est vrai, devait être singulièrement aidée par quelques notes qu’il venait de parcourir. Ces notes étaient simplement le dossier de la veuve Chupin adressé à titre de renseignement au parquet par la Préfecture de police.

Son examen achevé, le juge d’instruction fit signe à Goguet, son souriant greffier, de se préparer à écrire.

— Votre nom ?… demanda-t-il brusquement à la prévenue.

— Aspasie Clapard, mon bon monsieur, répondit la vieille femme, veuve Chupin, pour vous servir.

Elle esquissa une belle révérence, et ajouta :

— Veuve légitime, s’entend, j’ai mes papiers de ma-