Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 1.djvu/278

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pin, et d’ailleurs nous avons trouvé son signalement… C’est une femme de cinq pieds passés, très-brune, très-ridée, hâlée et comme tannée par la pluie, le vent et le soleil, enfin âgée d’une soixantaine d’années. Or, la visiteuse d’hier était petite, blonde, blanche et ne paraissait pas plus de quarante-cinq ans…

— Mais s’il en est ainsi, interrompit M. Segmuller, cette visiteuse doit être une de nos fugitives.

— Je ne le pense pas.

— Qui donc serait-elle, à votre avis ?

— Eh !… la propriétaire de l’hôtel de Mariembourg, cette fine mouche qui s’est si bien moquée de moi. Mais qu’elle y prenne garde !… Il est des moyens de vérifier mes soupçons…

Le juge écoutait à peine, tout ému qu’il était de l’inconcevable audace et du merveilleux dévouement de ces gens qui risquaient tout pour assurer l’incognito du meurtrier.

— Reste à savoir, prononça-t-il, comment le complice a pu apprendre l’existence de ce laisser-passer.

— Oh ! rien de si simple, monsieur. Après s’être entendus au poste de la barrière d’Italie, la veuve Chupin et le complice ont compris combien il était urgent de prévenir Polyte. Ils ont cherché comment arriver jusqu’à lui, la vieille s’est souvenue de la carte de sa sœur, et l’homme est allé l’emprunter sous le premier prétexte venu…

— C’est cela, approuva M. Segmuller, oui, c’est bien cela, le doute n’est pas possible… Il faudra vous informer cependant…