Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 1.djvu/362

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— Des arrhes ne se rendent jamais.

Le prévenu grommela des menaces confuses, dont on ne put guère saisir que ces mots : « vol manifeste » et encore : « la justice, » puis il sortit en tirant violemment la porte sur lui.

— Eh bien !… Ai-je répondu comme il faut ? demanda Fritz triomphant au jeune agent qui quittait son cabinet noir.

— Oui, parfaitement, répondit Lecoq…

Et d’un bras nerveux, faisant pirouetter le garçon, qui lui barrait le passage, il se précipita sur les pas de Mai.

Une vague appréhension lui serrait la gorge.

Il lui semblait que le prévenu n’avait été ni surpris ni ému véritablement. Il était venu à l’hôtel comptant sur Mme  Milner, l’âme damnée de son complice, la nouvelle du départ de cette femme eût dû le terrifier.

Avait-il donc deviné la ruse ?… Comment ?…

Le bon sens démontrait si bien que le prévenu en ce cas devait avoir été mis en garde, que la première question de Lecoq, en rejoignant le père Absinthe, rue Lafayette, fut celle-ci :

— Mai a parlé à quelqu’un en route ?

— Tiens !… répondit le bonhomme surpris, vous savez cela.

— Ah !… j’en étais sûr !… À qui a-t-il parlé ?

— À une jolie femme, ma foi ! blonde et boulotte.

Lecoq était devenu vert de colère.

— Tonnerre du ciel !… s’écria-t-il, le hasard est contre nous. Je cours en avant chez Mme  Milner, pour que Mai