Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 1.djvu/382

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sin qui a déjà sur les mains le sang de trois meurtres. Nous venons d’arrêter son complice qui lui a fait la courte-échelle.

Les rubis du nez du Suisse pâlirent visiblement.

— Il faut appeler les gens de service, balbutia-t-il.

Joignant l’action à la parole, il allongea la main vers la corde de la cloche qui lui servait à frapper les visites, mais Lecoq l’arrêta.

— Un mot avant !… dit-il. Le malfaiteur n’a-t-il pas pu traverser simplement l’hôtel et s’esquiver, par cette porte, sans être aperçu ?… Il serait loin en ce cas.

— Impossible !

— Cependant…

— Permettez ! je sais ce que je dis. Primo, le vestibule qui donne sur les jardins est fermé ; on l’ouvre pour les grandes réceptions, mais non pour les soirées intimes du lundi. Secondement, Monseigneur exige, quand il reçoit, que je me tienne sur le seuil de la porte… Aujourd’hui encore, il m’a renouvelé ses ordres à cet égard, et vous pensez bien que je n’ai pas désobéi.

— S’il en est ainsi, fit le jeune policier, un peu rassuré, nous retrouverons peut-être notre homme. Avertissez les domestiques, mais sans mettre votre cloche en branle. Moins nous ferons de bruit, plus nous nous ménagerons de chances de succès.

En un moment les cinquante valets qui peuplaient les antichambres, les écuries et les cuisines de l’hôtel de Sairmeuse furent sur pied.

Les grosses lanternes des remises et des écuries furent décrochées et le jardin se trouva illuminé comme par enchantement.