Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/155

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— Dictez vos conditions, monsieur.

— D’abord, vos visites ici, après certains bruits répandus par moi, éveilleraient des défiances. Vous ne viendrez nous voir que de nuit, à des heures convenues d’avance, jamais à l’improviste…

L’attitude seule de Maurice affirmait son consentement.

— Ensuite, comment traverserez-vous l’Oiselle sans avoir recours au passeur, qui est un dangereux bavard ?…

— Nous avons un vieux canot, je prierai mon père de le faire réparer.

— Bien. Me promettez-vous aussi d’éviter le marquis de Sairmeuse ?

— Je le fuirai…

— Attendez… il faut tout prévoir. Il se peut que le hasard, en dépit de nos précautions, vous mette en présence ici. M. de Sairmeuse est l’arrogance même, et il vous déteste… Vous le haïssez et vous êtes violent… Jurez-moi que s’il venait à vous provoquer, vous mépriseriez ses provocations…

— Mais je passerais pour un lâche, monsieur !…

— Probablement !… Jurez-vous ?…

Maurice hésitait, un regard de Marie-Anne le décida.

— Je jure !… prononça-t-il.

— Pour ce qui est de Chanlouineau, il sera bon de ne lui pas laisser trop voir notre intelligence… mais c’est mon affaire…

M. Lacheneur s’arrêta, réfléchissant, cherchant dans sa mémoire s’il n’oubliait rien.

— Il ne me reste plus, Maurice, reprit-il, qu’à vous adresser une dernière et bien importante recommandation… Vous connaissez mon fils ?

— Certes !… nous étions camarades quand il venait en vacances…

— Eh bien ! quand vous serez maître de mon secret, car à vous je dirai toute ma pensée… défiez-vous de Jean.

— Oh !… monsieur.