Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/167

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— L’abbé Midon !… fit Lacheneur abasourdi ; M. d’Escorval !…

Et prévoyant peut-être ce qui allait arriver, il ajouta d’un ton de fureur concentrée :

— Que me voulez-vous encore, tous deux ?

— Nous voulons empêcher l’accomplissement d’une œuvre de délire !… s’écria M. d’Escorval. La haine vous égare, Lacheneur !

— Eh ! monsieur, vous ne savez rien de mes projets !

— Pensez-vous donc que je ne les devine pas ?… Vous espérez vous emparer de Montaignac…

— Que vous importe !… interrompit violemment Lacheneur…

Mais M. d’Escorval n’était pas homme à se laisser imposer silence.

Il saisit le bras de son ancien ami, et d’une voix forte, de façon à être entendu par tous les gens du groupe, il poursuivit :

— Insensé !… Vous oubliez donc que Montaignac est une place de guerre, défendue par de profonds fossés et de hautes murailles… Vous oubliez donc que derrière ces fortifications est une garnison nombreuse commandée par un homme à qui on ne saurait refuser une rare énergie et une indomptable bravoure : le duc de Sairmeuse.

Lacheneur se débattait, essayant de se dégager.

— Tout a été prévu, répondit-il, et on nous attend à Montaignac. Vous en seriez sûr si, comme moi, vous aviez vu briller une lumière aux fenêtres de la citadelle. Et, tenez… regardez, on l’aperçoit encore. Elle m’annonce, cette lumière, que deux à trois cents officiers en demi-solde viendront nous ouvrir les portes de la ville, dès que nous paraîtrons…

— Et après !… Je veux admettre l’impossible ; vous prenez Montaignac. Que faites-vous ensuite ? Pensez-vous que les Anglais vous rendront l’empereur ? Napoléon II n’est-il pas prisonnier des Autrichiens ? Ne vous souvient--