Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/190

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le duc, sans toutefois dissiper entièrement ses soupçons.

— C’est donc ces vils coquins qui vous ont attaqué !… s’écria-t-il.

— Du tout !… J’ai simplement été obligé d’accepter un duel.

— Avec qui ?… Nommez-moi le scélérat qui a osé vous provoquer.

Une fugitive rougeur colora les joues de Martial, mais c’est du ton léger qui lui était habituel qu’il répondit :

— Ma foi non, je ne vous le nommerai pas. Vous l’inquiéteriez peut-être, et je lui dois de la reconnaissance à ce garçon… C’était sur la grande route, il pouvait m’assassiner sans cérémonie, et il m’a offert un combat loyal… Il est d’ailleurs blessé plus grièvement que moi…

Tous les doutes de M. de Sairmeuse lui revinrent.

— Si c’est ainsi, dit-il, pourquoi, au lieu d’appeler un médecin, vous enfermer pour soigner cette blessure ?…

— Parce qu’elle est insignifiante et que je veux tenir cette blessure secrète.

Le duc hochait la tête.

— Tout cela n’est guère plausible, prononça-t-il, surtout après les assurances qui m’ont été données de votre complicité.

Le jeune homme haussa les épaules de la façon la moins révérencieuse.

— Ah !… dit-il, et par qui ? Par votre espion en chef, sans doute, ce drôle de Chupin. Il m’étonne, monsieur, qu’entre la parole de votre fils et les rapports de ce chenapan, vous hésitiez une seconde.

— Ne dites point de mal de Chupin, marquis, c’est un homme précieux… Sans lui nous eussions été surpris. C’est par lui que j’ai connu le vaste complot ourdi par Lacheneur…

— Quoi ! c’est Lacheneur…

— … Qui était à la tête du mouvement ?… oui, marquis. Ah ! votre perspicacité a été outrageusement mys-