Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/205

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mon père… Elle serait ta fille alors, elle que j’ai tant aimée, tu reporterais sur elle tes tendresses divines…

Marie-Anne resta.

XXV


Le secret que les approches de la mort avaient arraché à Marie-Anne au fort de la fusillade de la Croix-d’Arcy, Mme d’Escorval l’ignorait quand elle joignait sa voix aux prières de son fils pour retenir la malheureuse jeune fille.

Mais cette circonstance n’inquiétait pas Maurice.

Sa foi en sa mère était absolue, complète ; il était sûr qu’elle pardonnerait quand elle apprendrait la vérité.

Les femmes aimantes, chastes épouses et mères sans reproche, gardent au fond du cœur des trésors d’indulgence pour les entraînements de la passion.

Elles peuvent mépriser et braver les préjugés hypocrites, celles dont la vertu immaculée n’eut jamais besoin des honteuses transactions du monde.

Et d’ailleurs, est-il une mère qui, secrètement, n’excuse la jeune fille qui n’a pu se défendre de l’amour de son fils, à elle, de ce fils que son imagination pare de séductions irrésistibles !…

Toutes ces réflexions avaient traversé l’esprit de Maurice, et plus tranquille sur le sort de Marie-Anne, il ne songea qu’à son père.

Le jour venait… Maurice déclara qu’il allait endosser un déguisement et se rendre à Montaignac.

À ces mots, Mme d’Escorval se détourna, cachant son visage dans les coussins du canapé pour y étouffer ses sanglots.