Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/212

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Par lui, l’abbé Midon et Maurice eurent leurs premiers renseignements positifs.

D’abord on était sans nouvelles de Lacheneur, non plus que de son fils Jean ; ils avaient échappé aux plus ardentes recherches.

En second lieu, il y avait jusqu’à ce moment deux cents prisonniers à la citadelle, et parmi eux le baron d’Escorval et Chanlouineau.

Enfin, depuis le matin, il n’y avait pas eu moins de soixante arrestations à Montaignac même.

On pensait généralement que ces arrestations étaient l’œuvre d’un traître, et la ville entière tremblait…

Mais M. Langeron connaissait leur véritable origine, qui lui avait été confiée, sous le sceau du secret, par son habitué le valet de chambre.

— C’est certes une histoire incroyable, messieurs, disait-il, et cependant elle est vraie. Deux officiers de la légion de Montaignac, qui revenaient de leur expédition ce matin, au petit jour, traversaient le carrefour de la Croix-d’Arcy, quand sur le revers d’un fossé, ils aperçurent, gisant mort, un homme revêtu de l’uniforme des anciens guides de l’empereur…

Maurice tressaillit.

Cet infortuné, il n’en pouvait douter, était ce brave officier à la demi-solde, qui était venu se joindre à sa colonne sur la route de Sairmeuse, après avoir parlé à M. Lacheneur.

— Naturellement, poursuivait M. Langeron, mes deux officiers s’approchent du cadavre. Ils l’examinent, et qu’est-ce qu’ils voient ? Un papier qui dépassait les lèvres de ce pauvre mort. Comme bien vous pensez, ils s’emparent de ce papier, ils l’ouvrent, ils lisent… C’était la liste de tous les conjurés de la ville et de quelques autres encore, dont les noms n’avaient été placés là que pour servir d’appât… Se sentant blessé à mort, l’ancien guide aura voulu anéantir la liste fatale, les convulsions de l’agonie l’ont empêché de l’avaler…

Cependant, ni l’abbé ni Maurice n’avaient le temps