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Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/236

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— J’étais à la Rèche, en effet, interrompit le baron, mais c’était, je vous l’ai déjà dit, avec la ferme volonté d’empêcher le mouvement.

M. de Sairmeuse eut un petit ricanement dédaigneux.

— Messieurs les commissaires, prononça-t-il avec emphase, peuvent voir que l’accusé n’a même pas le courage de sa scélératesse… Mais je vais le confondre. Qu’avez-vous fait, accusé, quand les insurgés ont quitté la lande de la Rèche ?

— Je suis rentré chez moi en toute hâte, j’ai pris un cheval et je me suis rendu au carrefour de la Croix-d’Arcy.

— Vous saviez donc que c’était l’endroit désigné pour le rendez-vous général ?

— Lacheneur venait de me l’apprendre.

— Si j’admettais votre version, je vous dirais que votre devoir était d’accourir à Montaignac prévenir l’autorité… Mais vous n’avez pas agi comme vous dites… Vous n’avez pas quitté Lacheneur, vous l’avez accompagné.

— Non, monsieur, non !…

— Et si je vous le prouvais d’une façon indiscutable ?…

— Impossible, monsieur, puisque cela n’est pas.

À la sinistre satisfaction qui éclairait le visage de M. de Sairmeuse, l’abbé Midon comprit que ce juge inique devait avoir entre les mains une arme inattendue et terrible, et que le baron d’Escorval allait être écrasé sous quelqu’une de ces coïncidences fatales qui expliquent sans les justifier toutes les erreurs judiciaires…

Sur un signe du commissaire rapporteur, le marquis de Courtomieu avait quitté sa place et s’était avancé jusqu’à l’estrade.

— Je vous prie, monsieur le marquis, lui dit le duc, de vouloir bien donner à la commission lecture de la déposition écrite et signée de Mlle votre fille.