Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/263

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Elle n’eut pas une seconde d’hésitation.

— Vous devez avoir lu, monsieur, commença-t-elle, la circulaire qui convoquait tous les conjurés !

— Certes !… j’en ai une douzaine d’exemplaires dans ma poche.

— Par qui pensez-vous qu’elle a été rédigée ?

— Par le sieur Escorval, évidemment, ou par votre père…

— Vous vous trompez, monsieur, cette lettre est l’œuvre du marquis de Sairmeuse, votre fils…

Le duc de Sairmeuse se dressa, l’œil flamboyant, plus rouge que son pantalon garance.

— Jarnibleu !… s’écria-t-il, je vous engage, la fille, à brider votre langue !…

— La preuve existe de ce que j’avance !…

— Silence, coquine ! sinon…

— La personne qui m’envoie, monsieur le duc, possède le brouillon de cette circulaire, écrit en entier de la main de M. Martial, et je dois vous dire…

Elle n’acheva pas. Le duc bondit jusqu’à la porte et d’une voix de tonnerre appela son fils.

Dès que Martial rentra.

— Répétez, dit le duc à Marie-Anne, répétez devant mon fils ce que vous venez de me dire.

Audacieusement, le front haut, d’une voix ferme, Marie-Anne répéta.

Elle s’attendait, de la part du marquis, à des dénégations indignées, à des reproches cruels, à des explications violentes. Point. Il écoutait d’un air nonchalant et même elle croyait lire dans ses yeux comme un encouragement à poursuivre et des promesses de protection.

Dès que Marie-Anne eut achevé :

— Eh bien !… demanda violemment M. de Sairmeuse à son fils.

— Avant tout, répondit Martial d’un ton léger, je voudrais voir un peu cette fameuse circulaire.

Le duc lui en tendit un exemplaire.

— Tenez !… lisez !…