Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/275

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Machinalement, M. d’Escorval colla son œil à un de ces interstices… Peut-être avait-il pour voisin quelque condamné ?… Il ne vit personne. Il appela, tout bas d’abord, puis plus haut… aucune voix ne répondit à la sienne.

— Si j’abattais cette mince cloison ?… pensa-t-il.

Il tressaillit, puis haussa les épaules. Et après ?… Cette cloison renversée, il se trouverait dans une chambre pareille à la sienne, ouvrant comme la sienne sur un corridor plein de factionnaires dont il entendait le pas monotone.

Cependant, c’était une pensée d’évasion qui lui était venue. Quelle folie !… Il devait bien savoir que toutes les précautions étaient prises.

Oui, il le savait, et pourtant il ne put s’empêcher d’aller examiner la fenêtre… Deux rangs de barres de fer la défendaient. Elles étaient scellées de telle sorte qu’il était impossible d’avancer la tête et de se rendre compte de la hauteur à laquelle on se trouvait du sol.

Cette hauteur devait être considérable, à en juger par l’étendue de la vue.

Le soleil se couchait, et dans les brumes violettes du lointain, le baron découvrait une ligne onduleuse de collines dont le point culminant ne pouvait être que la lande de la Rèche… Les grandes masses sombres qu’il apercevait sur la droite étaient probablement les hautes futaies de Sairmeuse… Enfin, sur la gauche, dans le pli de coteau, il devinait la vallée de l’Oiselle et Escorval…

Son âme s’envolait vers cette retraite riante, où il avait été si heureux, où il avait été aimé, où il espérait mourir de la mort calme et sereine du juste…

Et au souvenir des félicités passées, en songeant aux rêves évanouis, ses yeux, encore une fois, s’emplissaient de larmes…

Mais il les sécha vite, ces larmes, on ouvrait la porte de sa prison.

Deux soldats parurent.

L’un d’eux avait à la main un flambeau allumé, l’autre