Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/315

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au marquis. Ils étaient donc, en vérité, un peu naïfs de s’inquiéter. Ne resteraient-ils pas seuls juges de ce qu’il serait opportun de taire ou de révéler, et complètement maîtres de cacher ce qui serait de nature à trahir leur connivence ?…

Ils se mirent donc à l’œuvre immédiatement, avec un empressement qui eût fait évanouir les doutes, s’il y en eût eu parmi les assistants.

Mais qui donc se fût avisé de concevoir des doutes !…

Le succès de la comédie était d’autant plus certain que la fuite du baron d’Escorval paraissait menacer sérieusement les intérêts de ceux qui l’avaient favorisée.

Les détails de l’évasion, Martial pensait les connaître aussi exactement que les évadés eux-mêmes… Il était l’auteur, s’ils avaient été les acteurs du drame de la nuit.

Il s’abusait, il ne tarda pas à se l’avouer.

L’enquête, dès les premiers pas, révéla des circonstances qui lui parurent inexplicables.

Il était clair, et la disposition des lieux le démontrait, que pour recouvrer leur liberté, le baron d’Escorval et le caporal Bavois avaient eu à accomplir deux descentes successives.

Ils avaient dû, d’abord, descendre de la fenêtre de la prison jusque sur la saillie qui se trouvait au pied de la tour plate. Il leur avait ensuite fallu se laisser glisser de cette saillie jusqu’au bas des rochers à pic.

Pour réaliser cette double opération, et les prisonniers l’avaient réalisée, puisqu’ils s’étaient échappés, deux cordes leur étaient indispensables. Martial les avait apportées, on eût dû les retrouver.

Eh bien ! on n’en retrouvait qu’une, celle que les paysannes avaient aperçue, pendant de la saillie où elle était accrochée à une pince de fer.

De la fenêtre à la saillie, point de corde…

Ce fait sauta aux yeux de tout le monde.

— Voilà qui est extraordinaire ! murmura Martial devenu pensif.